Au Mali, l’enseignant n’est pas seulement mal rémunéré. Il est aussi mésestimé. La preuve, ces dernières années, le secteur éducatif fait figure de parent pauvre dans les distributions des médailles de reconnaissance des services rendus à la Nation. C’est à se demander si ce n’est pas le nombre élevé des enseignants qui complique l’évaluation de leurs accomplissements.
Toujours est-il qu’il est incohérent de voir d’excellents enseignants et professeurs d’université en fin de carrière, ayant formé des centaines de cadres de ce pays et dirigé des mémoires et des thèses, faits simplement Etoiles d’argent ou même jamais célébrés par la Nation, tandis que des jeunes en début de carrière sont pompeusement décorés chevaliers, officiers ou commandeurs de l’Ordre national.
En général, les bénéficiaires des médailles sont triés dans les rangs des enseignants syndicalistes, administrateurs, anciens ministres ou hauts fonctionnaires ; c’est-à-dire ceux qui sont soit plus visibles, soit plus proches des décideurs, soit plus redoutés.
Parallèlement, de grands enseignants et chercheurs, ayant fait autorité dans leurs domaines pendant plusieurs années et dont les services à la Nation sont unaniment salués, meurent dans l’anonymat. Souvent, c’est sur les cercueils des plus chanceux d’entre eux qu’on vient lamentablement déposer une médaille encombrante pour les familles endeuillées.
Pourtant, il faut commencer à récompenser plus régulièrement les enseignants intervenant à tous les niveaux de formation du citoyen malien : du préscolaire à l’enseignement Supérieur, en passant par le fondamental, le secondaire et le professionnel. Dès lors, il faut aller à la recherche des exemplaires du corps. Ils sont souvent moins bavards, mais pédagogiquement irréprochables. Cherchons les dans les villes comme dans les villages les plus isolés, et rendons leur hommage de leur vivant comme il se doit. Car c’est juste, car c’est beau, car c’est tout simplement humain de célébrer les meilleurs silencieux dans ce monde cruellement surmédiatisé qui écrase les méritants timides et honore les médiocres volubiles.
En fait, au-delà même des Ordres nationaux de la République, il serait nécessaire d’instituer une cérémonie exclusive de récompense des enseignants et des chercheurs, comme ça se fait actuellement dans plusieurs pays. La journée mondiale des enseignants – le 5 octobre – pourrait ainsi servir à cette fin. Les éventuelles récompenses pourraient varier selon les besoins des récipiendaires : bourses d’études supérieures, séjours de recherche, ordinateurs, moyens de transport, maisons, etc.
La même initiative devrait être matérialisée pour les médecins, les policiers, les sapeurs pompiers, etc., afin d’offrir des héros ordinaires à notre jeunesse en guise de modèles-sources d’inspiration.
Aboubacar Abdoulwahidou MAIGA
Enseignant-chercheur à l’ULSHB
Mali : l’éducation, parent pauvre des récompenses de l’Ordre national

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