Discours inflammatoire, paroles osées et quelques fois blessantes mais amusantes, telles sont les caractéristiques du discours du colonel Maïga, le samedi 24 septembre. Lors de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York, le Premier ministre par intérim du Mali a repris une attaque sévère contre la France, la qualifiant de « junte obscurantiste ». Le colonel Abdoulaye Maigah a également voulu riposter aux dirigeants africains qui ont exprimé leurs critiques de l’emprise de la junte au pouvoir à Bamako, notamment le président ivoirien Alassane Ouattara et le président nigérien Mohamed Bazum. Au cœur de plusieurs polémiques, la question sur la nationalité du président nigérien défraie les chroniques et crée des réactions à Niamey.
Des anciennes polémiques ravivées suite au discours du PM par intérim Maïga
Lors de son discours, le premier ministre par intérim du Mali a traité le président nigérien Mohamed Bazoum d’étranger à la tête de la république. Ces paroles ont fait réagir plusieurs personnes dans le pays. Depuis son retour de New York le dimanche passé, le président n’a encore rien dit concernant cette affaire. Cependant, c’est l’indignation dans son camp. Par exemple, le ministre délégué auprès du ministre d’Etat aux Affaires étrangères du Niger, Youssouf Mohamed Elmouctar, énervé, disait que : « L’ivresse de la junte malienne lui a fait oublier le sens du protocole et de la diplomatie. Il (Abdoulaye Maïga) a fait honte à l’Afrique et au monde civilisé ». De plus, il y a un député nigérien qui exige des excuses publiques ainsi que le rapatriement de l’ambassadeur nigérien au Mali.
Plusieurs personnalités comme Youssouf Mohamed Elmouctar, pensent que ce discours est un coup monté contre le président nigérien dont la question sur sa nationalité faisait déjà polémique dans le pays. En effet, fin mars 2019, Mohamed Bazoum, alors ministre de l’intérieur et main droite du président Mahamadou Issoufou est désigné par le parti pour se présenter au scrutin présidentiel. Cependant, plusieurs membres de l’opposition ont essayé tant bien que mal d’invalider sa candidature. Ces derniers l’accusent d’avoir fourni « un faux certificat de nationalité ». La Cour constitutionnelle après avoir tranché, a trouvé cette requête de l’opposition non fondée et l’a rejetée. Tout de même, les accusations et les polémiques n’ont pas cessé de se propager dans le pays.
Ainsi, en abordant la question de nationalité, le premier ministre Maïga savait ce qu’il faisait. Peut-être qu’il s’agit d’une manière pour lui de faire mal au président nigérien qui s’est érigé en ennemi de la junte malienne.
Est-ce que le président Bazoum est nigérien ?
D’entrée, le chercheur en sciences politiques nigérien Rahmane Idrissa évoque que « Les opposants pensent que la Cour constitutionnelle est inféodée au pouvoir donc ses décisions lui paraissent contestables ». Ainsi, on peut conclure que la question sur la légitimé de la citoyenneté du président doit être remise sur la table.
Sur les réseaux sociaux, les propos du colonel Abdoulaye Maïga ont suscité de vifs débats. Certains accusant le Mali d’attiser les tensions communautaires et même de tenir une rhétorique anti-arabe. En effet, le président Bazoum appartient à une toute petite minorité dans le pays, les Oulad Souleymane, originaires de Libye, dont certains se sont installés au Niger il y a des centaines d’années. Du fait de son arabité, remettre en cause son identité pourrait être perçu comme une discrimination. Mais en réalité, exclure les concurrents et s’assurer le pouvoir est une stratégie politique assez fréquente au Niger, disait une autre personnalité.
Cette situation est arrivée à l’ancien président Mamadou Thanja, dont les opposants avaient tenté d’utiliser l’ascendance mauritanienne pour invalider la candidature. Il semble donc erroné d’accuser les autorités maliennes d’incitation à la haine dans la communauté. D’autre part, par l’attaque contre la nationalité de Mohamed Bazoum, les efforts sur le panafricanisme sont remis en cause.
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