Fèves de cacao : le Ghana et la Côte d’Ivoire ont refusé de participer à la rencontre annuelle rassemblant les principaux acteurs de la filière à Bruxelles, les 26 et 27 octobre derniers

C’est une première du genre. La Côte d’Ivoire et le Ghana, respectivement premier et deuxième producteur de fèves de cacao au monde, ont décidé de mettre une pression de plus aux multinationales qui refusent d’augmenter la prime versée aux producteurs de cacao.

L’Opep du cacao pour augmenter les revenus des cacaoculteurs

Depuis 2018, la Côte d’Ivoire et le Ghana ont commencé une lutte pour assurer une augmentation des revenus aux planteurs du cacao. C’est dans cette optique qu’ils ont créé « l’Opep du cacao ». Cette organisation est au cœur des tensions fréquentes au sein de la filière du cacao qui rassemble les broyeurs, les chocolatiers, les producteurs, les traders qui ont tous leurs intérêts à protéger. Si depuis quelques années, l’industrie du chocolat finance la production d’un cacao durable à travers des programmes de traçabilité des fèves, de lutte contre la déforestation, elle ne veut pas régler la question du prix du cacao. Les plus grands producteurs de cacao au monde ont commencé par militer en faveur de leurs planteurs. Ils veulent une augmentation du prix d’achat de leurs produits. Ainsi, pour éviter de payer la prime exigée par l’Opep du cacao, les pays du Nord ont décidé d’inverser le marché.

Bakary Traoré, directeur exécutif de l’ONG IDEF (Initiatives pour le développement communautaire et la conservation de la forêt), membre de la plateforme, s’exprime en disant : « Quand vous regardez la production du chocolat, vous avez du lait, du cacao, du lait et du sucre. Le prix du sucre a augmenté, le prix du lait a augmenté, mais le prix du cacao ne fait que baisser. Et pourquoi ? Parce que le sucre et le lait sont produits dans les pays du Nord et qu’il faut aider les agriculteurs du Nord. Mais ceux du Sud, donc de la Côte d’Ivoire et du Ghana, on s’en fout, ce n’est pas notre problème. Non ! Il faut que cela puisse changer. Non seulement c’est injuste, mais en plus c’est à la limite de l’immoralité ».

Pour se faire entendre, les producteurs africains ont décidé de ne plus appliquer les programmes de cacao durable mis en œuvre par les industriels du Nord. En effet, le Ghana et la Côte d’Ivoire qualifient ces programmes de « greenwashing » et « d’hypocrisie ».

« La politique de chaise vide »

Les deux plus grands producteurs de cacao au monde ont boycotté la réunion annuelle de l’industrie du chocolat qui s’est tenu du 26 au 27 octobre à Bruxelles, organisée par la World Cocoa Foundation, une organisation qui rassemble la majorité des principaux acteurs de l’or brun. Les officiels ivoiriens et ghanéens attendus à l’ouverture de la rencontre ne se sont pas pointés. C’est une action très applaudie par les ONG qui plaident pour l’augmentation des revenus des agriculteurs. Pour eux, cette fermeté est louable. Il s’agit d’une pression sans précédent exercée sur les acteurs de la filière.

Peut-être que pour une première fois, les puissances du Nord comprendront que les africains sont décidés à prioriser leurs intérêts et à favoriser le bien-être de leurs agriculteurs. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la Côte d’Ivoire a lancé la construction d’une usine de transformation de fèves de cacao, « Atlantic cocoa corporation » dans la ville de San Pedro. Certainement, avec cette usine, la Côte d’Ivoire n’aura plus à dépendre des pays du Nord pour la gestion de son cacao.

La rédaction

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